Chimène s'était attendue à ce qu'on lui demande au moins d'où venait le sang, mais visiblement, c'était le cadet des soucis de la propriétaire. Fort bien, c'était mieux ainsi. Elle choisit une clé au hasard. Après tout, ce n'était pas très important. Elle se demandait seulement s'il était une très bonne idée qu'elles dorment dans des chambres différentes. Enfin, elle entendrait bien s'il y a du bruit.

Elle sourit un peu lorsque Carmen mentionna Alma. Chimène avait une petite idée de pourquoi elle trouvait utile d'avoir ce genre d'hôtels sous la main. Bien entendu, ce n'étaient pas les meilleurs souvenirs de sa vie, mais quelque part, elle les chérissait tout de même. Si elle devait tirer du positif de cette expérience, elle dirait qu'elle en a beaucoup appris. Elle prit Carmen dans ses bras durant quelques secondes.

"Ne pleure pas trésor. Rien n'est perdu. Veux-tu qu'on aille lire les journaux, ou préfères-tu te reposer ? Tu peux dormir, je monte la garde."

Carmen resta dans les bras de Chimène une petite minute, le temps de secher ses larmes.
"Je veux bien lire les journaux. Je ne suis pas sûre de pouvoir dormir... Surtout si il reste un espoir."
Elle n'avait pas vraiment envie aussi, de dormir, trop curieuse de savoir ce que planquait les journaux de son père.

Chimène acquiesça. Elle prit Carmen par l'épaule pour l'emmener dans la chambre, où elle retira finalement ses talons hauts pleins de sang. Un soulagement. Elle prit une petite chaise sur laquelle elle s'installa, et invita la jeune fille à se poser sur le lit. Le vent soufflait assez fort à l'extérieur, mais à l'intérieur, il se transformait en un simple sifflement, ou un claquement de volet occasionnel.

"Allez. Je suis sûre que ton père nous aura laissé quelque chose." Chimène en était réellement certaine. S'il y avait une chose qu'elle n'avait pas perdue avec le temps, c'était sa capacité à ne jamais se décourager ni douter tant qu'il restait la moindre once d'un espoir.

Carmen se laissa tomber sur le lit avec lourdeur, et dans un grand soupire. Accablé par la fatigue, elle était cependant incapable de fermer l'oeil. 
Elle se pencha sur les carnets, et en ouvrit un au hasard. 

Ils étaient remplis d'une écriture semblable à des runes anciennes, et couvert de dessins, avec quelques notes en anglais parfois. 
Les pages se succédaient sans pour autant se ressembler. Sur l'une on pouvait voir ce qui ressemblait à une recette de potion, et sur d'autre des dessins d'armes, d'oiseaux et d'autres objets magiques. 

Dans ce carnet, il y avait tout une partie réserver à un sortilège qu'elle n'avait jamais vu, du nom de "reditus". Rien qui lui parlait plus que ça. Pourtant, l'étude était poussé, jusqu'à étudier les flux magiques mit en jeu pendant l'utilisation du sort. Incapable de décrypter les runes, elle compris cependant que le sortilège permetait de renvoyer une attaque avec plus de précision qu'un simple protego. 
Elle tourna encore quelques pages, avant de tomber sur un dessin d'une femme nue vue dans un miroir, et enveloppé de vapeur, coincé entre le dessin d'un oeil d'horus et d'enombrables flèches le rejoignant. En toute lettre, elle avait pu lire 'Sorcha', suivit de qualificatifs peu flatteurs, avant que tout redeviene en écriture runique.

Elle soupira un peu et continua à tourner les pages jusqu'à la fin, ou la double page contenait le dessin d'une épave de chenillette visiblement allemande ensablé dans les dunes. Dans le coins des pages, elle remarqua des chiffres, mais rien de véritablement signifiquatif.
Elle jeta le carnet sur le coté et soupira.
"C'est incompréhensible... Et rien n'a de sens... Comment à t'il pu en faire autant..." 

Chimène lisait par-dessus l'épaule de Carmen. Elle reconnut plusieurs recherches que Graham menait à l'époque. Tant de souvenirs.

"Ma chérie, si cela t'étonne, c'est que ton papa t'a caché bien trop de choses sur sa jeunesse. Et au contraire… il faut mieux fouiller ce carnet. Il s'agit de ses recherches."

Elle se saisit du carnet, et le feuilleta pour arriver à la page qui l'intéressait.

"Reditus, c'est un sortilège que ton père a créé. Une sorte de protego amélioré qui réfléchit les sorts. Très utile, mais je n'ai jamais appris à l'utiliser. Simple question d'égo."

Chimène avait un sacré égo à l'époque, elle n'allait pas le nier. Et d'ailleurs, c'était toujours un peu le cas, bien qu'elle se soit fort adoucie. Elle tourna quelques pages.

"Sorcha, vois-tu, c'était le chat d'une bonne amie à moi à l'époque. J'étais présente lorsque ton père et ta mère l'ont ramené à la vie à l'aide d'un artefact égyptien. Une très mauvaise idée. Il n'a pas vraiment ressuscité, mais son cadavre a été possédé par un esprit facétieux. Qui s'est d'ailleurs fait un malin plaisir de nous rendre la vie impossible."

Elle referma le carnet.

"Il faudrait quelqu'un qui sache correctement lire les runes. Ta maman en saurait probablement plus. Elle était constamment à ses côtés, et ils transplanaient souvent on ne sait où sans prévenir personne. Nous pourrions visiter les lieux indiquer sur ces croquis, mais s'il n'y a rien, nous perdrions sans doute du temps."

Carmen soupira en tournant les pages, découvrant les dessins, les notes et les études de son pères... Indéchiffrables. C’était presque hypnotisant, et parfois assez surprenant.
Son père n’étant pas franchement un modèle d’affection, elle était étonnée de voir le nombre de dessins massifs représentant sa mère, mais aussi de ceux qui étaient surement ses amis.
" Tiens… C’est vous là ? Non ? "
Dit-elle d’une voix lasse en indiquant un dessin de Chimène assise sur un lit avec une autre femme, l’une aidant l’autre à allumer une cigarette.
 
Elle continua de tourner les pages de la vie de son père jusqu’à trouver quelque-chose d’intéressant dans un carnet roussi par les flammes et taché de sang. En dessous d’un dessin de Voldemord en personne, il y était représenté différents objets, et sur la page d’à côté, un long texte en runique avec quelques mots en français rajouté entre les lignes.
" Je crois… Je crois que j’ai trouvé le moment ou il à commencé à s’intéresser à vos… Machin. "
 
Elle ne savait même pas ce qu’étais un horcruxe, ou bien comment cela fonctionnait. Mais s’il y avait un moyen de ramener son père, elle le ramènerait, coûte que coûte.
" Comment on fait ces trucs ? Et comment ça fonctionne au juste ? Parce que c’est cool, on va partir en chercher, mais ensuite on en fait quoi ? "
Dit-elle en gardant les yeux fixé sur l’homme qui avait semé la terreur sur le monde des sorciers il y a bien longtemps maintenant.

Chimène ne put retenir un petit rire surpris lorsque Carmen mentionna le dessin.

"Ah ah… vraiment ? Il m'a dessinée ?"

Chimène se reconnut à l'époque. Le style tomboy, le manque de classe, et la tendance à s'intoxiquer. De plus, Graham était un bon dessinateur. Il s'agissait clairement de son visage. 

"C'est bien moi… eh bien, il devait manquer de modèles."

Lorsque la jeune Carmen en arriva à la page de l'étude de Voldemort, le regard de Chimène sembla se remplir d'une lueur indescriptible. Elle avait elle-même étudié la magie noire, et savait que Graham le faisait très certainement aussi. En aurait-il donc bien créé ? A vrai dire, quand elle avait parlé d'un moyen de le ramener, elle aurait presque pensé qu'il aurait trouvé une autre façon, plutôt que les horcruxes.

"Les horcruxes sont des objects dans lesquels sont enfermés une partie de l'âme de leur créateur", expliqua Chimène. "Pour les créer, il faut simplement tuer quelqu'un pour déchirer son âme. Une fois séparée, l'âme devient très instable. Mais ainsi, il n'y en a qu'une partie qui meurt avec le corps."

Elle se ficha d'un grand sourire, le regard fasciné, planté sur la page du carnet.

"Ah ah, le petit malin. Je savais bien qu'il finirait par étudier ce genre de choses… si Graham a bien utilisé des horcruxes, alors il faut lui trouver un nouveau corps dans lequel implanter son bout d'âme pour le ressusciter. A moins que le sien soit bien conservé, mais j'en doute."

Elle était plus plongée dans ses pensées qu'elle accordait d'attention à Carmen. D'où le fait qu'elle avait appelé son ami par son prénom. Elle sembla soudain se rappeler de la présence de la jeune fille.

"... Mais nous ne savons pas encore si c'est bien ce qu'il a utilisé, ni même s'il a utilisé quoi que ce soit. Encore moins où les trouver. Qu'est-ce qu'il y a ensuite ?"

" Mon père ? Vous pensez qu’il a fait ça ? Je… Je savais qu’il faisait de la magie noire, mais je ne savais pas qu’il… Qu’il irait jusque là. "
Sa voix ne trahissait pas une tristesse ou un offusquement quelconque, mais plus un certain intérêt sur le passé de son père. Pourquoi lui avait-il caché tant de chose, et pourquoi lui avoir interdit l’accès à ses recherches ? La curiosité de Carmen ne faisait que grandir au fur et à mesure que les minutes passaient.
 
“Le reste ? Le reste…”
Elle tourna la page du carnet, détachant les yeux de Voldemord. Les feuilles suivantes étaient plus étranges que les autres. Exit les dessins et autres plan griffonné sur les coins du carnet, tout semblait d’un seul coup plus structuré. Une bonne quarantaine de lignes en écriture runiques se succédaient en petits paragraphes, comme pour une explication. On pouvait aussi voir le nom de Sorcha apparaitre plusieurs fois dans le texte, ainsi que celui de Voldemord, écrit de toute lettre sans aucune honte. Quelques mots écrits en Français indiquait des noms de pays tel que l’Egypte ou la Bolivie, et cela continuait au moins sur 5 pages.
 
" Quel intérêt d’écrire tout ça pour que personne ne le comprenne… Papa t’es vraiment un peu con… "
Soupira Carmen en haussant un sourcil, les yeux rivés sur le texte, essayant en vain de comprendre ne serait-ce qu’une petite phrase. La dernière page du carnet ressemblait à des équations mathématiques impliquant une âme et de la magie.
" Tiens… C’est un peu de ça que vous parliez non ? Enfin… Je n’y comprends pas grand-chose… "
 Elle s’allongea sur le lit en tendant le carnet à Chimène. Carnet qui laissa s’échapper une bague qui roula sur le sol.

"Vraiment ? Ton père était très avide de puissance, mais aussi d'une grande curiosité. Il s'intéressait constamment aux arcanes disparus, interdits, tabous. Chaque fois qu'il trouvait quelque chose de nouveau, aussi noir que ce soit, il s'y intéressait immédiatement. Il aimait tout particulièrement découvrir ce que personne ne souhaitait qu'il découvre. Il se souciait très peu des conséquences. Je ne sais pas s'il a vraiment fait cela, créer des horcruxes j'entends, mais je ne pense pas que cela soit au-dessus de lui."

Elle était surprise que sa propre fille ne le sache pas. Le petit malin avait bien caché son jeu. Elle tenta de lire les runes sur les pages suivantes, mais sans succès. Elle en était tout à fait incapable. Au moins, elle reconnut les noms d'endroits, qui étaient déjà une piste. Ainsi que Sorcha. Elle se demanda pourquoi son nom revenait autant. Avait-il continué d'étudier l'artefact égyptien ? Était-il lié aux horcruxes ? Quoi qu'il en soit, elle pouffa de rire lorsqu'elle entendit Carmen insulter son père.

"Petite futée, tu peux rigoler, mais imagine si les hommes qui te recherchaient avaient mis la main sur ce carnet. Nous serions bien rendus." Elle fit une petite pause. "Cela dit, tu n'as pas tort sur ce point."

Elle fit une pause pour fixer l'équation. Une énigme ? Ou plutôt un outil ? A ce stade, il était difficile de le savoir. Quoi qu'il en était, il fallait tenter de la résoudre. Chimène se saisit du carnet… puis, elle se stoppa lorsqu'elle entendit la bague rouler.

"Qu'est-ce que quoi…?"

Chimène posa le carnet, se releva, et alla ramasser l'objet, qui avait roulé sous un meuble.

"Une bague ? Je n'ai pas rêvé, elle était bien dans le carnet."

Le bijou dans sa main, elle s'assit sur le lit à nouveau, puis inspecta les runes de très près. Elle ne trouvait rien… au lieu de cela, elle décida d'observer la bague sous tous les angles, puis de la passer à son doigt.

"Mon père est quelqu'un de très lunatique et de très secret... J'ai l'impression qu'il est devenu prudent en peu de temps, vu qu'il à appris beaucoup à mon frère, et peu de chose à moi."
Elle soupira un peu.
"Peut-être qu'il s'attendait à ce que mon frère déraille..."

La jeune fille se redressa et se pencha sur la bague, qui dégageait une puissance magique assez intimidante.
"Attend... Bouge pas..."
Elle examina la bague sans pour autant la toucher, et ses yeux brillèrent.
"Je crois que c'est la bague de fiançailles de Papa. Celle que maman lui reprochait toujours d'avoir perdu."
Elle toucha du bout des doigts la bague, et une forte odeur de pin et des sons de cloches résonnèrent dans sa tête. Elle devait contenir le souvenir du mariage d'Alma et de Graham. Et si la magie était assez puissante pour laisser échapper une larme d'émotion à Carmen, que devait-il en être du coté de Chimène...

Elle resta muette quelques seconde, avant qu'une idée lui traverse l'esprit.
"Attend... Chimène... Il n'a pas laissé la bague ici pour rien. C'est peut-être une indication? On pourrait chercher du coté de là ou ils se sont mariés? Je crois que c'est en Espagne. Non loin de Cadix."
Carmen passa une main dans ses cheveux.
"Il faut bien commencer quelque-part... Et puis je sais que ce moment à été l'un des plus grand dans sa vie. On trouvera peut-être plus d'indice là bas."

Quand Chimène passa la bague à son doigt, elle se sentit immédiatement engloutie par l'énergie magique. Elle savait qu'elle était toujours dans la chambre d'hôtel, avec Carmen. Et pourtant, ses sentiments lui criaient qu'elle vivait ce souvenir. L'émotion lui donna les larmes aux yeux, et elle entendit à peine la jeune fille lui dire de ne pas bouger. La blonde retira très vite la bague. Si elle voulait voir des trucs qui n'existent plus, elle mangerait des champignons.

"... S-Sa bague de fiançailles, tu dis. Ah ah..."

Elle avait remarqué qu'il s'adoucissait, mais elle n'aurait jamais cru que Graham était aussi sentimental. Une facette de lui qu'elle ignorait, apparemment. Elle trouvait cela étonnamment touchant. Ou peut-être que c'était la magie de la bague à l'oeuvre. Quoi qu'il en était, elle allait bien se moquer de lui lorsqu'elle le retrouverait, et ce pour plus d'une raison. Les vieilles habitudes ne mourraient pas facilement. Elle essuya une petite larme et renifla. On n'avait pas idée d'enchanter son alliance comme cela. Il aurait au moins pu choisir une réplique en toque, histoire de pouvoir porter l'originale. Ahuri.

Elle acquiesça devant la proposition de Carmen. "Peut-être... c'est un indice que…" elle essuya une autre larme. Puis fronça les sourcils. Graham allait lui payer ça. "... C'est un indice que seul l'un de ses proches pourrait comprendre, j'imagine. D'une certaine manière. Peut-être que c'est pour cela qu'il a laissé ça là." Elle haussa les épaules. "Mais n'oublions pas que nous cherchons peut-être pour rien. Rien ne nous dit qu'il a vraiment inventé et laissé un jeu de piste au cas où il mourrait." 

Elle jeta un regard dehors. 

"Il vaut mieux y aller demain", reprit-elle. "J'imagine que tu dormiras mieux à présent que nous avons une piste." Elle lui tendit le miroir à double-sens, qu'elle avait récupéré. "Si jamais tu as besoin de mon aide, cries dedans. D'accord ?"

Elle se releva.

La jeune adulte saisit le miroir et l'examina un peu, en essayant de ne pas rire devant Chimène qui cédait à la puissance de l'enchantement de son père. Cela dit, si cela reflétait vraiment les sentiments de Graham, elle même était étonnée que cela soit aussi puissant. Son père n'était pas vraiment le genre de personne à laisser transparaitre ses sentiments, qu'il gardait bien souvent profondément enfouis dans son cœur d'obsidienne.

En réalité, elle ne se souvenait vraiment pas avoir vu son père rire au éclats une seule fois. Ou même lui faire une autre félicitation que 'bien joué'. Généralement, c'était sa mère qui s'en chargeait. Lui était plus discret, et généralement, il ne valait mieux pas l'énerver. Affectif sans vraiment l'être, il gardait toujours un œil sur elle et Nathan, toujours là pour soutenir sans pour autant pousser à faire quelque-chose. Cela dit, il n'était pas un mauvais père, il manquait juste un ingrédient majeur dans son rôle parental : l'empathie. 
D'ailleurs, elle ne suivrait surement plus jamais ses conseils 'avisés' par rapport aux relations sentimentales et l'amour en général. 

Carmen soupira et se redressa un peu avant de se lever pour prendre les clefs de la deuxième chambre. Chaque mouvement lui parut soudainement plus dur. Comme-ci toute l'adrénaline des dernières heures retombait d'un seul coup sur les épaules en une chape de fatigue.
"Tu as raison... J'ai besoin de repos..."
Elle fit une courte pose et sourit un peu avant de faire volte-face vers la porte. Tout comme son père, elle avait du mal à remercier quelqu'un... Mais aujourd'hui c'était particulier.  
"Me... Merci... Chimène. Pour tout ce que tu as fait ce soir pour moi. Même si on ne se connait pas."
C'est vrai qu'elle l'avait tiré d'un sacré problème... Cette Chimène était sacrément utile tout de même, en plus d'être plutôt sympa. L'avoir à ses cotés allait être plutôt utile pour faire revenir son père rapidement.

A ce niveau, elle était convaincu que son père ne s'était pas laissé tuer aussi rapidement... Il avait forcément un trompe la mort quelque-part. Chimène en avait l'air convaincue, alors elle aussi.
Elle avança la main vers la porte et s'arrêta subitement, comme prise d'une crise de curiosité sans indomptable.
"Chimène? Tu connaissait mon père pendant la guerre? Il était... Comment?" 

Chimène fut presque touchée par le remerciement.

"Je t'en prie. Tu es la fille de mes amis. Tu ne me connais pas. Moi, je sais juste que tu comptes pour eux. Donc tu comptes pour moi…"


Elle s'apprêta à aller se coucher, mais lorsque la jeune fille se retourna, elle ne put s'empêcher de répondre à sa question.

"Arrogant. Toujours à provoquer. Il se mettait tout le groupe à dos et créait beaucoup de tensions, à part avec moi et ta mère. Et encore… il a réussi à m'énerver quand il a agressé ma meilleure amie physiquement. Et quand il a fait un bad trip suivi d'une overdose, l'ahuri."

Elle n'avait aucune gêne à parler de cela, elle ne mettait donc pas de gants.

"Il passait son temps à se vanter et à rabaisser tout le monde. Il faut dire qu'il était doué. Résultat, beaucoup lui répondaient en faisant la même chose, et en essayant de le surpasser. Ils avaient beaucoup d'insécurités, si tu veux mon avis. Moi, j'avais confiance en moi et en mes capacités, donc je n'avais pas besoin de le dire. Du coup, il m'énervait très rarement."

Elle sourit un peu dans le vide alors que de vieux souvenirs remontaient.

"On se battait tout le temps… mais dans le fond… je crois qu'une confiance s'est installée entre nous quand même. Je l'ai sentie… et elle m'a changée, je crois." Elle rit légèrement. "C'est en partie grâce à cela que j'ai étudié la médicomagie. Jamais cela n'aurait été dans mes projets si je n'avais pas rencontré ton père. Le reste du groupe aussi, mais lui en particulier. Il se blessait tout le temps. Tout le temps… et pas de petites blessures." Elle regardait le plafond. "J'ai dû le soigner quand il s'est planté une branche dans la jambe après un transplanage. Quand il s'est retrouvé…" Elle hésita à le dire. "Une côté cassée et l'intérieur du ventre ravagé après une séance de torture." Si elle arrivait à le dire si facilement, c'était que c'était cathartique. "J'ai assisté le groupe alors qu'il avait pris de la drogue pour oublier ça… il faisait un bad trip. Certains se moquaient de lui et voulaient l'attacher. Leurs insécurités, je te l'ai dit. Mais même ta mère l'a giflé tant elle n'en pouvait plus." Elle se souvenait très clairement de tout cela. Il s'agissait probablement des souvenirs les plus marquants de toute sa vie. "Je leur ai dit de se calmer et de lui parler doucement. De le rassurer. Et puis là, il a fait une overdose et une crise cardiaque, et j'ai piqué une crise." Elle rit. "Il s'est cassé sa côte une nouvelle fois après un nouveau transplanage… il a commencé à prendre beaucoup trop de médicaments et d'antidouleurs… en bref, il nous gardait bien occupés." Elle sourit. "Cela dit… tout cela m'a fait réaliser quelque chose. Graham n'était pas immortel. Je pouvais perdre ces personnes. Et je ne voulais pas les perdre…" elle fixa la moquette un moment. "Ca m'a fait grandir, toute cette histoire." Perdue dans le fil de ses pensées, elle passa à un autre sujet. "Ta maman, c'était autre chose, par contre. Elle était très pragmatique, mais aussi très rassurante. Une sorte de pilier. Malheureusement, tout le monde se reposait sur elle, alors elle craquait parfois. Parfois, cela coïncidait avec mes propres craquages. Alors je lui faisais des câlins. C'était l'une des rares personnes que j'écoutais et que je ne voulais pas décevoir, aussi. Quelquefois, je me demande si je ne la considérais pas comme une sorte de maman aussi…" Elle rit un peu. Cela pouvait paraître étrange. "Voilà. C'était tes parents à vingt ans. Quand j'y pense… je suis sûr que ton père est persuadé que je lui suis indifférente au mieux, que je le déteste au pire. Autant garder cette impression." Elle sourit.

…
…
 
Carmen regarda Chimène avec deux grands yeux globuleux. De la torture ? Papa lui avait dit que ça n’avait pas été facile tous les jours, et que parfois les mangemorts leurs infligeaient de sévères corrections.
C’était ainsi qu’il avait expliqué ses maux de dos à répétition et ses remontées de sang par la bouche… Mais elle n’aurait jamais cru que ces séquelles étaient les fruits d’une quelconque torture.
 
En ce qui concernait le Bad-trip, elle l’ignorait aussi… Mais elle se doutait tout de même qu’il avait déjà essayé la drogue, d’où sa souplesse à ce sujet, surtout lorsqu’elle rentrait de chez son ami avec des pupilles rondes comme des frisbee. Il lui disait toujours que ce n’était pas bien, et surtout complètement illégal, tant dans le monde moldu que dans le monde magique, mais ne lui faisait jamais plus de reproche, et ne la punissait jamais. Pourtant, dieu sait qu’il avait la punition facile.  
 
" Il y a plein de chose que je ne savais pas… Comme la torture ou l’overdose… Mais je dois t’avouer qu’il n’a pas tant changé que ça avec les autres. Il est toujours d’une arrogance singulière et assez amusante, même avec maman parfois… Heureusement il se casse facilement quelque chose aussi, ça le remet à sa place."
Elle ria un peu et un sourire vantard s’afficha sur son visage
" Je pense que c’est parce qu’il veut toujours prouver que c’est le meilleur, même s’il n’a pas vraiment à le prouver. Parce que c’est le meilleur. Ou alors il se vante et se moque des autres parceque leurs réaction l'amuse. On ne sait pas trop. Enfin, ce que je sais, c'est que je le détrônerais et prendrais sa place de plus grand sorcier, quand ce sera un vieux papi croulant ! "
 
Elle fit une courte pose en se retournant vers la porte.
"Ils ne parlaient pas beaucoup de vous. Mais même si je ne sais pas pour papa, maman tiens beaucoup à tout ses amis, et regrette souvent de ne voire jamais personne, à cause de tout le travail qu’elle a."
 
Elle finit par ouvrir la porte en baillant un peu et dit sobrement en sortant
"A demain Chimène. "
Elle rejoint sa chambre, adjacente, d’un pas lent et lourd malgré le froid glacial. Elle était exténuée. Aussi, à peine fut elle entrée qu’elle s’écroula sur le lit, encore toute habillé, et s’endormit pour le reste de la nuit.

Chimene ne put s’empêcher de sourire. Carmen et Graham étaient très différents, mais dans un sens, elle restait la fille de son père. Tout aussi compétitive que lui. Elle était vexée que Graham n’ait jamais parlé d’elle, certes, mais elle pouvait le comprendre. La blonde pouvait parler de ce qu’elle avait vécu avec un détachement qui semblait étrange pour la plupart des gens. La vérité, c’était qu’il était cathartique de tout laisser sortir, pour elle. Graham devait probablement gérer les choses différemment.

"… Je suis sûre que tu surpasseras ton père de très loin. Passe une bonne nuit, Carmen."

Lorsque la blonde se retrouva seule dans sa chambre, elle prit une grande inspiration, le temps de réaliser qu’elle se retrouvait à nouveau embarquée dans une histoire impossible. Des mangemorts, de retour… elle ne pouvait pas laisser cela se produire, et pourtant, une partie d’elle refusait d’accepter la vérité. Elle devrait bien le faire, cela dit. Plus elle hésiterait, et le plus longtemps elle permettrait à ces parasites de proliférer.

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Chimene s’était levée tôt, assez tôt pour acheter des pains aux chocolats. La fraîcheur du matin lui avait rappelé bien des souvenirs, qu’elle souhaitait enfouir autant qu’elle chérissait, puisqu’ils lui rappelaient qu’elle était en vie. La femme avait pris l’habitude de donner des petits pains aux personnes qui vivaient un moment difficile. Ils avaient une étrange propriété calmante, pour elle du moins, comme s’ils représentaient le calme après la tempête. Elle toqua doucement à la porte de la chambre de Carmen.

"Carmen ? Tu es réveillée, ma chérie ? Il faut partir."

Elle espérait que la pauvre n’avait pas fait de cauchemars. Quoiqu’avec la soirée qu’elle avait vécue, cela semblait très probable. Quoi qu’il en fût, elles devaient se rendre à Cadix dans les plus brefs délais. Le repos avait été bienvenu, mais elles ne devaient pas s’éterniser. La blonde jeta un œil à sa montre. Six heures trente du matin… peut-être pouvait-elle lui laisser un peu de temps ? Probablement pas. Le plus loin et le plus vite elles se trouveraient, le mieux ce serait.

Carmen roula dans ses couverture lorsqu'on frappa à la porte de sa chambre. 
"Mmhhm... Pas tout de suite... l'est trop tôt maman..."
marmonna t'elle en enfouissant son visage dans son coussin... Avant de se lever en sursaut.
La réalité eu l'effet d'une énorme claque, qui noua la gorge de la jeune femme, et lui arracha une larme qu'elle s'empressa d'ecraser contre sa joue.
"J'arrive Chimene !"
Dit-elle d'une voix claire, dont elle avait masqué tout les signes de détresse.

Carmina se redressa doucement et s'assit sur le bord de son lit et regarda la porte du b&b avec insistance pendant plusieurs minute. 
Elle avait tout perdue... Toute sa vie s'était écroulée du jour au lendemain. Plus de famille, plus de maison. Juste elle et une vielle amie de la famille dont son père ne parlait jamais.
Elle enfouit un peu la tête entre ses mains et lâcha un long soupire. Plus elle y pensait plus ses yeux se mouillait et sa gorge se serrait.
Mais il restait de l'espoir. Les carnets. Les horcruxes. Rien n'était encore perdu. Et si c'était perdu, elle voulait en avoir le coeur net.
Dans un élan d'énergie, Carmen réussi à se lever et ouvrit doucement la porte. 
"Je suis là ! On peut y aller... de toute façon c'est pas comme si j'avais pris des affaires !"
Dit-elle d'une voix pleine d'énergie, et pétrie d'espoir.
"Tu es là seule d'entre nous deux qui connaît l'endroit ou il c'est marié ! Je suis sûre et certaine qu'il y a d'autres indices là bas !"

Chimene fut soulagée d'entendre la voix de la jeune fille derrière la porte. Pas qu'elle ait douté qu'elle l'entendrait, bien sûr ; s'il y avait un problème, elle aurait pu le voir à travers son miroir. Mais il était normal qu'elle soit sur les nerfs, après tout. Elles pourraient être attaquées à tout moment. Elle s'étonna presque de voir l'enthousiasme de la jeune fille, mais s'imagina qu'elle gérait la douleur de la même façon qu'elle à son âge.

"Bien sûr, ne t'en fais pas. Je suis sûre qu'on va trouver quelque chose." Elle lui fit un grand sourire qu'elle voulait rassurant. "J'ai pris des pains au chocolat. Pioche. Tu peux même en avoir plusieurs."

La femme sortit sa baguette s'étira, et offrit sa main à la jeune fille.
"... Je me sens mieux qu'hier. Je pense que je peux nous faire transplaner directement à Cadix. J'espère que tu ne m'en voudras pas si on laisse ta voiture ici, en revanche. Elle ne nous servira pas à grand chose, mais on pourra toujours revenir la chercher quand on en aura fini."

Elle soupira longuement avant de parler dans sa barbe.

"Graham, tu n'as pas intérêt à avoir laissé traîner cette bague pour rien... ou je te ressusciterai pour te retuer."

Carmen fourra sa main dans le sac en papier et attrapa deux pains au chocolat qu'elle engloutit quasiment immédiatement quand son estomac lui rappela qu'elle n'avait rien mangé déjà hier.
"La voiture est à mon père..."
Son visage se ferma un peu et l'étincelle d'espoir dans ses yeux vacilla.
"Il n'en a pas besoin pour l'instant..."
La jeune femme attrapa la man de Chimène en là serrant bien fort, et elle soupira avant de dire avec une pointe d'excitation. 
"Allons-y !"

Elle ne savait pas vraiment si ce qu'elle faisait était... Bien? Mais cette Chimène... Elle était quelqu'un avec qui elle se sentait bien. Elle dégageait cette même aura que ses parents... Indescriptible, mais sécurisante. Mais n'allait elle pas trop vite? Elle connaissait Chimène depuis moins de 24 heures, et les récents événements l'avait plongé dans un marasme mental indescriptible. 

Suite
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